L'Unique Etoile

L'Unique Etoile est l'un des nombreux navires des mages blancs qui sillonent Eneryn. C'est un bateau léger et rapide. Des charmes tissés par les mages se chargent de sa protection.

Lorsque je resortis sur le pont, la nuit était tombée. Les marins s'affairaient pour permettre au bateau de prendre la mer avec la marée. Finalement, les amarres furent larguées et le bateau s'éloigna du port. Le navire sur lequel se trouvait Ysandrelle ne partirait qu'à l'aube. Je la cherchai des yeux mais elle n'était pas sur le pont. Je soupirai et regardai une dernière fois Shanshen, espérant ne jamais avoir à revenir dans ce lieu. La colère et la douleur que j'avais éprouvé semblèrent un instant resurgir jusqu'à ce que je me rende compte que c'était en fait mon mal de mer qui reprenait du service. J'essayai de faire abstraction.

A quelques mètres de moi, un mage regardait lui aussi la ville s'éloigner. Il sentit mon regard et tourna la tête vers moi. Il était jeune... et très beau !
- Bonsoir ma soeur, me dit-il avec un sourire.
Dans sa bouche le mot "soeur" me sembla étrange. Il était vrai que les mages blancs et les paladins étaient les serviteurs d'un même idéal et qu'ils avaient depuis longtemps allié leur force dans le combat. La magie et l'épée mais la même bravoure. Je souris à cette pensée. Qui mieux que ces hommes pouvait me comprendre ? J'étais vraiment heureuse d'être parmi eux.
- Bonsoir mon frère, finis-je par répondre.

Au moment où il s'apprêtait à reprendre la parole, un autre mage arriva sur le pont et lui dit de venir. J'entendis son nom et le gravai dans ma mémoire : Judikael. Il me lança un dernier regard et s'en fût. A mon tour je gagnai ma cabine, le tête pleine d'étranges pensées. Un marin m'apporta mon repas puis je m'endormis, bercée par les flots et par mon mal de coeur lancinant.

Un rayon de soleil entra par le hublot et me réveilla. Je me vêtis et sortis sur le pont pour adresser à mon dieu sa prière du matin. Tinélith était déjà en vue.

Je restai sur le pont à regarder l'île grandir. Beaucoup de questions se bousculaient dans mon esprit : où aller ? à qui demander ? l'héritier était-il simplement encore vivant ?
Ma tâche n'allait pas être facile sur cette terre peuplée de barbares. Je tournai la tête et regardai les hommes présents sur le pont. Le jeune mage de la veille n'était pas en vue. Je soupirai et reportai mon regard sur les flots. A la vue des vagues mon estomac se tordit et je me retournai brusquement vers le pont, le coeur au bord des lèvres.

- Maudit soit ce mal de mer ! maugréai-je.
Je me rendis compte que le vieux mage auquel j'avais parlé la veille se tenait à quelques mètres de moi. Je respirai et tentai de me donner une contenance en me redressant. Il s'approcha.
- Bonjour ma fille. Comme tu le vois ta destination est en vue. Dans peu de temps nous mettrons une chaloupe à la mer et elle te mènera à une plage de l'ouest de l'île. Tu rejoindras ensuite Shimerider par tes propres moyens
J'acquieçai.
- Je sais que la magie n'est pas la bienvenue en ces lieux Père.
- En effet mon enfant et ta mission n'en sera que plus délicate. La discrétion et la force seront tes plus précieuses alliées sur cette terre.
- Pélor puisse-t-il être témoin de ma vaillance et m'accepter auprès de lui si la mort vient à me frapper.
Le vieux mage hocha la tête.
- Loués soit son nom et sa puissance.

Il se retourna et fit quelques pas avant de s'arrêter. Il me fit face de nouveau et dit :
- J'ai pensé qu'il serait utile pour notre ordre de recueillir des renseignements sur cette île hermétique à la magie. Nous craignons que les Ténèbres n'en profitent pour s'infiltrer en ces lieux. C'est pourquoi l'un de nos frères t'accompagnera. Bien entendu il ne devra en aucun cas révéler ses pouvoirs sous peine de rencontrer la mort bien plus tôt que prévu. Il te suivra en se faisant passer pour ton écuyer. Après tout, une guerrière de ta qualité ne devrait pas voyager seule.

- Il en sera fait selon votre désir Père, répondis-je docilement.
Après tout, un peu de compagnie ne serait pas de refus. Un homme sortit des cabines à la poupe. Il était vêtu simplement. C'était le jeune mage.
- Fils je te présente Oriane que tu accompagneras pour cette mission.
Judikael me fixa mais ne dit rien. Il avait des yeux gris superbes.

Le fracas de la chaine d'ancre mis fin au silence. Le bateau s'était immobilisé et déjà les marins descendaient une chaloupe.
- Je vais chercher Vandale, dis-je à l'adresse des deux hommes et je m'en fus vers la cale.
Je sellai mon étalon et le fis monter sur le pont. La chaloupe était déjà à l'eau et se cognait contre la coque au rythme des vagues.

Un mage lança un sort sur mes effets pour qu'ils soient protégés de l'eau et j'ordonnai à l'étalon de sauter. Vandale dessina un arc de cercle puis traversa le pont en deux puissantes foulées et bondit par dessus le bastingage. Quelques secondes plus tard, une énorme gerbe d'eau vint balayer le pont. Je m'approchai du bord et vit l'étalon qui nageait vigoureusement vers la plage. Je descendis ensuite dans la chaloupe auprès de Judikael et les marins nous emmenèrent jusqu'à la plage où Vandale nous attendait en s'ébrouant.

Sortie l'Unique Etoile
Entrée Plage des sabres

Sortie plage des Sabres
Entrée l'Unique Etoile

Les mages qui venaient de me transporter s'écartèrent et s'éloignèrent pour prendre un peu de repos. Le Père s'approcha de moi et me regarda droit dans les yeux. Je détournai le regard. Il posa une main apaisant sur l'encolure de Vandale.
- Les chemins de la lumière prennent parfois des tours bien étranges mon enfant, ne perd pas espoir.
Je relevai les yeux et lui offris un sourire plein de gratitude. A quelques mètres, accoudé au bastingage, Judikael me fixai. Je serrai les dents mais ne dit rien. D'un geste le mage le congédia. Il savait.

Je descendis de cheval et allait installer Vandale dans son box. Lorsque je remontai, le Père vint me demander où je voulais me rendre maintenant. Après une seconde de réflexion je répondis :
- A Lomériand. Même si je dois y passer le reste de mes jours, je fouillerai chaque île d'Eneryn pour accomplir ma mission.
Le mage hocha la tête mais ne dit rien. Je me demandai un instant s'il avait compris mon but sans que j'ai eu besoin de lui en dire le moindre mot. Impossible de savoir. Finalement, je le quittai pour rejoindre une des cabines et prendre du repos.

Un jeune homme m'apporta à manger. Je me restorai quelque peu, mon mal de mer étant revenu. L'Unique Etoile fendait les flots avec vélocité. Je m'allongeai et finis par m'endormir d'un sommeil peuplé de cauchemars.

Des coups à la porte de ma cabine me réveillèrent.
- Quoi ? grognai-je à demi-réveillée.
- Nous sommes en vue de la côte Sud de Lomériand, Dame.
- J'arrive.
Je me levai. Le soleil était déjà en train de descendre dans le ciel, j'avais beaucoup dormi. J'adressai une prière à mon Dieu en m'excusant d'avoir raté celle du matin puis je me vêtis et pris toutes mes affaires. Le Père m'attendait.
- Te voilà arrivée mon enfant.
- Merci mon Père, dis-je simplement.
Puis je descendis seller Vandale. Cela fait, je le fis monter sur le pont et nous nous plaçâmes au centre d'un cercle formé par quatre mages qui commençaient à incanter pour nous télétransporter sur la plage.

Le Père me regardait mais ne dit rien. L'instant d'après, des picotements parcouraient mon corps et je me retrouvai sur la plage, à plusieurs centaines de mètre du bateau.

Sortie L'Unique Etoile => Entrée Plage Verte (sud de Lomériand)